C'est terminé
C'est terminé. Je pensais écrire ces mots dans une petite année. Mais ce sont les chapitres du voyage qui imposent le mot FIN. Il est difficile de mettre des mots sur la situation et l’événement qui nous conduisent à ce sabordage. Une histoire de mots pour soustraire des maux. Je vais donc aller à l'essentiel pour omettre les détails. Ces derniers sont lugubres, violents et n'ont leur place que dans les abysses du passé. Une piste de terre en Arizona. Nous y étions seuls dans un univers complètement désertique. Des kilomètres de plénitude, Manon venait juste de lancer : « c'est trop beau la liberté ! ». Et puis, un 4x4 stationné sur le bas côté. Là, tout a basculé au cauchemar en une seconde. Une situation irréelle qui désormais défile en boucle dans notre cerveau, comme une scène de film au ralenti. J’espère que nos filles n’ont pas tout compris à ce qu'elles ont vu et entendu. Pour nous, adultes, ce fut déjà traumatisant. Notre vulnérabilité de voyageur à vélo nous a sauté au visage. Nous étions pourtant conscients de cette vulnérabilité, que ce soit sur la route ou face aux éléments. Nous y avons déjà été maintes fois confrontés et ceci fait partie intégrante du choix de voyager à bicyclette. Mais, lorsque pendant quelques heures la vie de ta famille ne tient qu'à la réaction et la décision d'un taré armé d'un flingue, il est temps de revoir les choses. Le voyage ne peut pourtant pas s'arrêter là . Nous devons absolument continuer pour mettre de la distance entre ce continent et notre futur. Rentrer serait vivre avec ces images violentes qui voilent notre regard et ces hurlements qui hantent notre esprit. Il nous faut les effacer. Nous terminons donc ce voyage à vélo pour voler vers l’Asie. Là-bas, nous aviserons… Une dizaine de jours se sont écoulés depuis cet événement. Alors que j'écris ces lignes, pas mal de choses se sont passées. Je continuerai cependant à tenir ce journal de bord.